Table ronde
Il y a bientôt cent ans, le 11 avril 1924, naissait à Toulouse l’Office national industriel de l’Azote (ONIA), l’ancêtre de ce qui deviendra plus tard l’usine chimique AZF. Pour beaucoup de Toulousains, cette création a incarné les origines du développement industriel de leur cité, à une époque où l’aéronautique n’en était encore qu’à ses débuts. Toutefois, depuis le traumatisme de l’explosion du 21 septembre 2001, le rapport des Toulousains à ce passé est devenu problématique, au point que la tragique explosion a eu pour effet de gommer les huit décennies d’histoire ouvrière qui ont précédé la catastrophe. Aussi, ce drame a contribué à faire émerger deux mémoires complètement antagonistes. La première, renvoyant à l’ONIA, reste chargé par les « anciens » d’une image positive, celle d’une « usine nourricière » pourvoyeuse d’emploi, de croissance et de progrès social pour les ouvriers pendant la période dite des « Trente Glorieuses ». La seconde, renvoyant au sigle AZF se trouve à contrario, associée à l’image d’une « usine meurtrière », symbole de déclin, de vétusté, de nuisance écologique et de danger. Retour sur le passé et l’épopée d’une industrie qui fit vivre de très nombreuses familles toulousaines, avec une usine qui employait des centaines de personnes sur Toulouse, des salaires excellents, un des premiers comités d’entreprise et un impact sur la ville.
En présence d’historiens, de scientifiques et d’anciens salariés, cette conférence-débat souhaite retracer 100 ans d’histoire industrielle et ouvrière qui ont durablement marqué la vie des Toulousains.
ARMAND CASSE est enfant de l’usine où son père a travaillé jusqu’à sa mort dans un accident de moto, puis où sa mère est alors entrée grâce à la solidarité qui s’est manifestée, Armand Cassé, conducteur d’appareil et secrétaire du comité d’entreprise, s’est plongé, après l’explosion de l’usine en 2001, dans un travail de conservation de la mémoire. À partir des archives du CE et d’autres qu’il a triées et scannées, il a élaboré le documentaire « L’ONIA, une usine sortie de l’oubli ».
SERGE BAGGI est un ancien conducteur d’appareil à l’APC-AZF, et ancien secrétaire du CE d’AZF-Grande Paroisse. Il a été rapporteur de la commission d’enquête du comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT) de l’usine AZF de Toulouse, après le drame du 21 septembre 2001.
MICKAEL LLOPART a écrit sa thèse devenue un livre sur l’ONIA. Professeur d’histoire-géographie au collège du Fousseret et chargé de cours en histoire contemporaine à l’université Jean-Jaurès, Michaël Llopart, 36 ans, Toulousain qui a vécu la catastrophe du 21 septembre 2001, publie ces jours-ci « Aux origines d’AZF. Le problème de l’azote en France 1919-1940 » (Presses universitaires François-Rabelais). Un livre, 22 ans après l’explosion de l’usine, dont le but est de rappeler le début de la longue histoire de l’ONIA et de l’industrie chimique à Toulouse.
GILBERT CASAMATTA est professeur des Universités, ancien Président de l’Université de Toulouse et de l’INP de Toulouse. Au moment de la catastrophe il se trouvait sur le site de l’INP-ENSIGC qu’il avait dirigé jusqu’en 2000.
BERTRAND VAYSSIÈRE est historien contemporanéiste (université de Toulouse Jean-Jaurès), spécialiste de la construction de l’Union européenne. Il a récemment pu-blié 2001. L’explosion d’AZF, de l’usine nourricière à l’usine meurtrière, éditions Midi-Pyrénéennes, coll. « Cette année-là », 2021.
La table ronde était animée par Jean-Luc Laronce
https://www.haute-garonne.fr/service/chemins-de-la-republique-les-evenements